Il est probablement difficile pour un non-chimiste de parler de produits chimiques. La chimie est en effet une science dite exacte ce qui signifie que l’approximation en est bannie.
Dès les premières lignes, un certain étonnement m’a pris, qui s’est rapidement transformé en sourire dubitatif avant de tourner en franche rigolade. En effet, c’est certain, l’auteur de l’article a carrément oublié (s’il les a jamais suivi) les cours de chimie du secondaire qui traitent de la composition de l’air que nous respirons.
Jugez plutôt :
« Des fermiers néerlandais protestent régulièrement depuis le 10 juin et l’annonce par le gouvernement de projets destinés à réduire les émissions d’azote, un gaz à effet de serre ».
L’azote (N) ou plutôt le diazote (N2) car la molécule comporte deux atomes d’azote liés entre eux n’est pas un gaz à effet de serre. D’ailleurs, pour avoir la propriété d’effet de serre la molécule d’un gaz doit être dissymétrique afin de constituer ce qu’on appelle un dipôle, c’est-à-dire un système qui possède entre autres la capacité de vibrer et/ou de se déformer à une fréquence bien définie. Or, la molécule de diazote est parfaitement symétrique et n’est pas capable d’absorber un rayonnement infrarouge en entrant en vibration comme peuvent le faire les molécules de CO2 ou les molécules de vapeur d’eau.
« Les agriculteurs néerlandais sont en colère. En cause : la politique de réduction des émissions d’azote ».
L’air de l’atmosphère terrestre est composé d’un mélange de deux gaz principaux, le diazote (78,1 %) et le dioxygène (20,9 %) et d’une série de gaz secondaires : l’argon (0,93 %), le CO2 (425 ppm), le néon (18,2 ppm), l’hélium (5,2 ppm), le méthane (1,7 ppm) et le krypton (1,1 ppm). Plus de la vapeur d’eau en quantité très variable (de 0,5 % à 5 % suivant les lieux géographique et la saison). Vouloir contrôler les émissions d’azote dans l’air serait à peu près aussi stupide que de vouloir réglementer les rejets d’eau dans la mer pour éviter de noyer les poissons…
« Des manifestants ont par ailleurs franchi de façon violente un barrage de police à proximité du domicile de la ministre néerlandaise de la Nature et Azote Christianne van der Wal à Harderwijk, qui a présenté ce plan avec le Premier ministre Mark Rutte ».
Ici, une approximation plutôt politique : madame Christianne van der Wal est plus précisément ministre de la Nature et de la Politique de l’Azote (minister for Nature and Nitrogen Policy). Il aurait été plus clair de remplacer « Politique de l’Azote » par « politique concernant les composés de l’azote ».
« Les fermiers néerlandais s’opposent aux projets du gouvernement destinés à réduire les émissions d’azote ».
Le projet du gouvernement néerlandais n’est évidemment pas de réduire les émissions d’azote. Il est de réduire les émissions de protoxyde d’azote (N2O) et des ions nitrates (NO3-) qui sont tous les deux des dérivés de l’azote.
Les émissions de protoxyde d’azote relatives aux activités agricoles proviennent de la gestion des effluents d’élevage. Le protoxyde d’azote est un puissant gaz à effet de serre (GES) ayant un pouvoir de réchauffement global (PRG) sur 100 ans 310 fois plus élevé qu’une masse équivalente de CO2. Il est donc déclaré comme participant grandement au réchauffement climatique de la planète. Le protoxyde d’azote contribue également au phénomène de destruction de la couche d’ozone.
Les ions nitrates (NO3-) proviennent essentiellement des engrais mais peuvent aussi se former par oxydation naturelle des ions ammonium (NH4+) issus des déjections animales (nitrification).
Globalement, l’élevage est donc un émetteur important de composés de l’azote.
« L’azote est un composé de l’ammoniac et pollue l’air et les cours d’eau. Il est notamment à l’origine des algues vertes et peut se transformer en particules fines ».
On est là en plein délire de chimie approximative. Tout d’abord, l’azote n’est pas un composé de l’ammoniac, mais un composant de la molécule d’ammoniac (NH3) : nuance importante… La molécule d’ammoniac comporte trois atomes d’hydrogène (H) et un atome d’azote (N).
L’azote et sa molécule naturelle stable le diazote est le composant principal de l’air que nous respirons. Il est donc très stupide de dire qu’il pollue l’air et les cours d’eau. Ce n’est pas l’azote qui est « à l’origine » des algues vertes mais plutôt les ions nitrates (NO3-) qui favorisent leur développement car elles s’en nourrissent.
La transformation de l’azote en particules fines ne serait possible que si la température descendait en dessous du point de congélation du diazote, soit -210 degrés… Des particules fines contenant des nitrates peuvent se former au-dessus de la mer à partir des embruns et à condition que l’eau des embruns s’évapore. Cependant, la teneur en chlorures de l’eau de mer (19,35 %) est bien plus forte que celle des nitrates (30 ppm soit 0,0030 %), si bien que s’il y a formation de particules fines, celles-ci seront essentiellement composée de chlorure de sodium (sel marin) avec seulement des traces de nitrate de sodium.
Certains produits azotés sont donc bien à l’origine de pollutions : le protoxyde d’azote, gaz à effet de serre et destructeur de la couche d’ozone ; les ions nitrates, qui provoquent la prolifération des algues vertes (principalement ulves) ; l’ammoniac qui peut se transformer en ions nitrates.
Tous ces produits azotés sont issus de l’activité d’élevage et si l’on veut réduire ces émissions, il est clair qu’il faut réduire l’activité d’élevage, c’est-à-dire le nombre de fermes qui représentent l’un des fleurons de l’agriculture néerlandaise.
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