n 2006, le célèbre producteur et metteur en scène Al Gore, lauréat du Festival de Cannes Prix Nobel de la Paix nous a gratifié d'une superproduction avec effet spéciaux et émotions garantis qui a fait le tour du monde et a rempli ses poches.
Dans son film, le célèbre coureur de monde montrait, entre autres spectacles destinés à provoquer l'horreur et la panique du bon peuple et démontrait que la ville de New-York serait sous 6 mètres d'eaux en 2100, à cause de la fonte de la couverture glaciaire du Groenland qui allait faire monter le niveau de la mer. Notons que le scientifique français Jean Jouzel interrogé sur la qualité de ce fim l'a jugé "scientifiquement correct".
Au mois d'avril 2011 se tenait le Symposium Annuel de la Science Antarctique. Une des présentations faites à ce symposium est en rapport direct avec le film d'Al Gore. Elle s'intitule : "the role of the Greenland Ice Sheet in future sea levels - Based on palaeorecords from ice cores and present observations" c'est à dire : "Le rôle de la calotte glaciaire du Groenland dans le futur niveau de la mer - Fondé sur des données paléontologiques de carottes glaciaires et des observations actuelles". (Ce qui est, à mon avis, un peu plus crédible que les créations sorties tout droit de l'imagination d'un visionnaire aussi intéressant qu'intéressé).
Qu'a fait Dorthe Dahl-Jensen1, le commentateur et l'auteur de la présentation en question ?
Il a foré (avec son équipe) la glace permanente du Groenland jusqu'au socle rocheux (2560 m), puis il a analysé des carottes glaciaires extraites . Cette campagne de forage a été effectuée dans le cadre d'un projet de recherche appelé NEEM (North Greenland Eemian Ice Drilling) dont les objectifs et le programme sont décrits ici.
Le forage a comporté de nombreuses innovations, dont l'utilisation d'un nouveau fluide de forage (non aqueux) ainsi que la possibilité de forages horizontaux dans les horizons présentant un intérêt particulier.
Ce sont les carottes issues de la dernière partie du forage qui nous intéressent ici. Elles concernent l'avant-dernière période interglaciaire appelée Eemien (environ 120 000 ans en arrière par rapport à aujourd'hui). L'examen détaillé des analyses de ces carottes glaciaires et la comparaison des résultats avec les résultats des forages précédents (GRIP) a montré que la couverture de glace sur le sud -Groenland a persisté durant l'Eémien, alors que la température était 5 degrés plus élevée qu'elle ne l'est aujourd'hui2 .
On peut noter que ce résultat est en assez grande contradiction avec les résultats issus de modèles de Otto-Bliesner et al. qui avaient été repris par Eric Steig sur le site de Real climate à une époque où on ne parlait qu'avec inquiétude de la fonte accélérée du Groenland. Ce résultat contredit également l'étude de Overpeck et al. qui montre un Groenland entièrement dégagé de glace durant l'été (mais il s'agit, là aussi, de résultats de modèles climatiques) :
Le modèle climatique de Otto-Bliesner et al. indiquait l'épaisseur de la glace recouvrant le Groenland pendant la période la plus chaude de l'Eémien.
L'mage de gauche (A) correspond à la disparition de la glace permanente à l'endroit du forage GRIP. Celle de droite (B) correspond à la fonte maximum de la glace permanente. Cette fonte correspond à une élévation du niveau de la mer de 3,4 m par rapport au niveau actuel.
Ce modèle (Otto-Bliesner) n'a cependant pas été confirmé par l'examen des carottes de glace du projet GRIP, car, comme l'indique Landais et al. la dernière partie du carottage (la plus profonde) présente un aspect perturbé qui ne permet pas de remonter à des informations climatiques au-delà de -110 000 ans. Il a été nettement infirmé par les derniers résultats de la campagne de forage NEEM.
Le modèle climatique de Overpeck et al. nous renseignait entre autres sur les conditions de température régnant aux mois de juillet et août dans 4 cas présentés de gauche à droite : 1) époque actuelle, 2) maximum éémien, 3) année 2100 et année 2130.
On voit que dans les 3 cas de droite, les températures de juillet et août entraînent forcément au bout d'un certain temps une disparition complète des glaces permanentes sur tout le Groenland. (Mais n'oublions pas qu'il s'agit de simulations au moyen de modèles climatiques).
Ce modèle n'a pas été confirmé non plus par les résultats de la campagne NEEM.
En août 2010, Richard Alley, professeur à la Pennsylvania State University, a déclaré : "la totalité de la glace du Groenland disparaitra si la température augmente de 2 degrés ".
Les résultats de la campagne NEEM infirment également totalement cette déclaration. En effet, cette campagne a montré que malgré une température 5 degrés supérieure à la température actuelle, la glace a persisté sur le Groenland.
La conclusion de toute cette affaire, c'est que certains scientifiques dont la démarche s'apparente tout à fait à celle d'Al Gore ont été bien imprudents de s'avancer sur des prévisions catastrophiques uniquement issues du fonctionnement de leurs modèles climatiques. Les résultats des observations finissent toujours par mettre de l'ordre dans les affirmations fondées sur des suppositions gratuites...
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